Infobf.net : Le mouvement syndical a joué un rôle de premier rang lors de l’insurrection populaire des 30 et 31 octobre 2014 et surtout dans la résistance au putsch du 16 septembre 2015. Deux ans après, peut-on dire que l’insurrection a tenu ses promesses ?
Bassolma BAZIE : il faut savoir apprécier les évènements dans leur contexte et ne pas mesurer ou surestimer les acquis. L'histoire de toute société dépend de la prise de conscience des populations. Les acquis sont très immenses et comme la direction du mouvement est l'œuvre des masses et à voir le niveau de la grogne sociale nous pouvons dire que toutes les promesses des masses ne sont pas tenue et qu'il y a encore beaucoup d’attentes légitimes non satisfaites.
Vous parlez très souvent de « préserver des acquis de l’insurrection » quel est le fond de cette pensée ? Et de quels acquis vous faites allusion ?
Le niveau actuel de maturité du peuple burkinabé fait qu'il est un exemple pour beaucoup de peuples. Si nous repartons au début des années 1990 et peu avant, les différents pouvoirs avaient semé la terreur tel que certains pensaient que même un « margouillat » pouvait diriger ce pays. La force du mouvement démocratique a permis d'élever le niveau de conscience politique et idéologique des masses et l'un des aboutissements est l'insurrection. L'insurrection n'est qu'une étape vers un changement structurel. Le monde paysan qui, probablement dans sa grande majorité, n’a pas participer à l'insurrection s'est montré pendant la résistance et même après avec leur propre forme d'organisation d'auto défense qui inquiète toute la classe politique imperméable au changement. La gestion du Burkina est actuellement observée par l'ensemble des citoyens ; et ceux qui ne comprennent pas pensent que les travailleurs en particulier et les populations en générale exagèrent. La loi anti corruption a vu le jour, des lois comme la RGAP ont été abrogées. Les audits des secteurs sur le logement, sur les mines sont à l'ordre du jour et tous ceux-ci sont des acquis à préserver. Des formes d'organisations pour le combat ont vu le jour. Les populations exercent le contrôle citoyen n’en déplaise au dirigeants actuels et à venir. Ces quelques acquis sont à préserver pour l'atteinte du changement structurel. Mieux, la réalisation de l’insurrection populaire conformément à l’article 35 de la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme et des Peuples de 1793 stipulant que : "Quand le gouvernement viole les droits du peuple, l'insurrection est pour le peuple, et pour chaque portion du peuple, le plus sacré des droits et le plus indispensable des devoirs". Que le peuple burkinabé use de ce droit et assume ce devoir de façon réussie les 30 et 31 octobre 2014, c’est un acquis historique à défendre et à approfondir. La résistance héroïque et victorieuse aussi ne peut qu’être inscrite immanquablement dans ce registre.
Bassolma BAZIE (avec micro)lors d’un meeting à la bourse du travail de Ouagadougou
Lors de la commémoration de l’an 2 de l’insurrection populaire, l’Unité d’Action Syndicale (UAS), dans une déclaration, s’insurgeait contre « la lenteur et les tergiversations » dans le traitement des dossiers des martyrs de l’insurrection populaire. D’aucuns estiment qu’elle joue le rôle de l’opposition politique, que répondez-vous à cela ?
Le dossier des martyrs à notre sens est un dossier où les acteurs de crime, les commanditaires et les exécutants sont connus. Refuser de rendre justice c'est être complice ou co-auteur de ces actes de crimes. Demander justice n'est pas le rôle de l'opposition politique uniquement mais le rôle de tous les citoyens. En tant que structures de lutte, nous restons dans la ligne de défense des citoyens pour la dignité et pour l'intégrité. Du reste, la grève générale lancée dans la soirée du mercredi 16 septembre 2015 par cette Union d’Action Syndicale (UAS) contre le putsch, contre l’amnistie des criminelles, pour la libération des autorités prises en otage, la défense de la démocratie, des libertés, de la dignité et de l’intégrité n’était-elle pas politique ? Le mouvement syndical burkinabé, conformément aux principes dévolus à tout contre-pouvoir sérieux et conscient, prend des positions sans état d’âme pour la défense de la dignité humaine et nous nous battrons pour que ce soit toujours ainsi.
Pour la commémoration du 18ème anniversaire de la disparition tragique du journaliste Norbert ZONGO, vous avez annoncé plusieurs activités avec un grand meeting, pourquoi le mouvement syndical monte-t-il au créneau cette année ?
Vu le temps mis dans la lutte pour la vérité et la justice depuis le 13 décembre 1998, beaucoup de choses se sont passées, les nouveaux nés à son temps ont au moins 18 ans aujourd’hui, il est donc nécessaire de faire quelques rappels pour rafraichir la mémoire sur ce dossier. En effet :
Après les assassinats de Norbert ZONGO, Yembi Ernest ZONGO, Blaise ILBOUDO et Abdoulaye NIKIEMA dit Ablassé le 13 décembre 1998, la pression populaire pour la vérité et la justice a contraint le régime de Blaise COMPAORE a créer une Commission d’Enquête Indépendante par décret n°98-0490/PRES/PM/MEF/DEF/MJ-GS/MATS du 18 décembre 1998, modifié par le décret n°99-001/PRES/PM//MEF/MJ-GS/MATS du 7 janvier 1999.
Celle-ci à la fin de ses travaux a indiqué six(06) suspects sérieux : « les soldats Christophe KOMBACERE et Ousséni YARO, le Caporal Wampasba NACOULMA, les sergents Banagolo YARO et Edmond KOAMA et l’adjudant Marcel KAFANDO. Ces éléments du Régiment de la Sécurité Présidentielle (R.S.P).
Le 21 Mai 1999, le Chef de l’Etat Blaise COMPAORE institue un Collège de sages. C’est le même jour fort curieusement que le Procureur du Faso Dramane YAMEOGO, à son temps, ouvrait enfin une information au Cabinet du Juge d’instruction ILBOUDO Wenceslas pour assassinat contre X et cela plus de cinq (5) mois après le drame. Pour la circonstance ce juge reçut des moyens conséquents (21 millions) pour l’instruction du dossier Norbert ZONGO. Une journée nationale de pardon est organisée le 31 mars 2001 au stade du 4 août avec en sa tête le Monseigneur Titiama Anselm SANOU comme président de la Commission.
Le mercredi 19 juillet 2006, le Pouvoir de la IVème République par la voix des Sieurs Abdoulaye BARRY et Adama SAGNON, respectivement Procureur Général et Procureur du Faso décidait, comme s’il était possible, de classer définitivement le dossier Norbert ZONGO, et cela à travers un montage grossier de la Justice Burkinabè. En effet ces deux juges annonçaient au cours d’une conférence de presse ce jour-là que le Juge Wenceslas ILBOUDO venait de prononcer un non-lieu au profit de Marcel KAFANDO sous le fallacieux prétexte que le sieur Jean Racine YAMEOGO, l’unique témoin à charge se serait rétracter. Messieurs le Premier Ministre Ernest Paramanga YONLI et le Ministre de la Justice Boureima BADINI se sont empressés de se féliciter du bouclage de ce « dossier qui n’a que trop duré ». Le Non-lieu prononcé par le Juge Wenceslas ILBOUDO le 18 Juillet 2006 est confirmé par la Chambre d’accusation le 18 Août 2006. Malgré l’intensification de la pression populaire pour la réouverture du dossier, le régime COMPAORE est resté sourd.
Suite à ces développements, les Requérants ont saisi la présente Cour Africaine des Droits de l’Homme et des Peuples (CADHP), le 11 décembre 2011. La CADHP rend son verdict le 28 mars 2014 : « La Cour conclut que l’Etat défendeur n’a pas agi avec la diligence due dans la recherche, la poursuite et le jugement de l’assassinat de Norbert Zongo et de ses trois compagnons. La cour note en conséquence que l’Etat défendeur a violé sur cet aspect le droit des requérants à ce que leur cause soit entendue par les juridictions nationales tel que garanti par l’article 7 de la Charte » a expliqué le juge Niyungeko. Selon la CADHP « l'examen du dossier montre qu'il y a eu un certain nombre de carences dans le traitement de cette affaire par la justice nationale ». Et elle a énuméré alors une liste des « carences » observées dans le dossier Norbert Zongo.
Les carences de la procédure pointées par la CADHP :
Première carence, la durée de l'affaire, un peu moins de huit ans entre les premières investigations et l'ordonnance de non-lieu d'août 2006. L'Etat burkinabé n'a pas su convaincre du fait que ce délai était raisonnable.
Deuxième carencepointée par la cour , les autorités n'ont pas cherché à poursuivre d'autres pistes d'investigation, notamment celles évoquées par la commission d'enquête indépendante en mai 1999.
Troisième carence, l'audition tardive des parties civiles. C'est seulement huit années après les faits que celles-ci ont été entendues par le juge d'instruction. « La diligence aurait commenté une audition des parties civiles dès les premiers stades de l'enquête » note l'arrêt lu vendredi matin.
Quatrième carence pointée par la cour : après l'ordonnance de non-lieu prononcée en faveur du principal inculpé en août 2006, les autorités burkinabé n'ont entrepris aucune autre investigation comme si l'affaire était close, alors qu'aucun coupable n'avait été retrouvé et jugé.
Enfin, au-delà des plaignants, selon la Cour, « c'est toute la presse qui a été mise sous pression par ce déficit de justice. Elle ne se prononce pas encore sur les réparations éventuelles mais laisse 30 jours supplémentaires aux deux parties pour lui soumettre leurs arguments sur la question... »
Pour la réouverture donc du dossier, le compte-rendu du conseil des ministres du gouvernement burkinabé, le 23 décembre 2014, annonce que le ministre en charge de la Justice a saisi le Procureur général du Faso pour la réouverture dudit dossier.
Le doyen des juges d’instruction, Emile ZERBO, ne pouvait pas offrir mieux aux familles de Norbert ZONGO et de ses 03 compagnons retrouvés calcinés sur la route de Sapouy le 13 décembre 1998. A quelques jours de la commémoration du 17ème anniversaire de ces odieux assassinats, il a inculpé 03 militaires, tous issus de l’ex-Régiment de sécurité présidentielle (R.S.P), qui faisaient partie des suspects sérieux indiqués par la Commission d’Enquête Indépendante mise en place à cet effet. Il s’agit du soldat Christophe KOMBACERE, du caporal Wampasba NACOULMA et du sergent Banagoulo YARO. Notons que parmi les autres suspects désignés par cette CEI, le Sergent Edmond KOAMA et l’adjudant Marcel KAFANDO sont malheureusement déjà décédés.
Le Gouvernement de Roch Marc Christian KABORE dit que « le dossier suit son cour ».
Le mouvement syndical fait partie intégrante du Collectif des Organisations Démocratiques de Masses et de Partis Politiques (CODMPP) qui est né le 16 décembre 1998, suite aux assassinats crapuleux du dimanche 13 décembre 1998. Reculer après l’insurrection populaire c’est trahir les masses, et le mouvement syndical ne peut que monter au créneau au vu de la remise en cause de certains acquis, de la léthargie, des libérations provisoires et des décisions judiciaires falsifiées (cas de la Cour de Cassation) etc. il est impérieux de monter au créneau. Dans les différentes plateformes du mouvement syndical nous demandons la réouverture effective et instruction sérieuse du dossier Norbert ZONGO et compagnons ; jugement et châtiment de tous les commanditaires et auteurs de crimes de sang et de crimes économiques. Du reste pour ce 18e anniversaire c’est une mobilisation citoyenne sur l’ensemble du territoire national pour la lutte contre l’impunité, contre la vie chère, pour la défense des droits socio-économiques, et pour les désertés démocratiques, politiques, syndicales et d’expression.
Qu’attendez-vous des autorités ? Elles disent que le dossier avance.
Beaucoup de ceux qui nous gouvernent étaient au pouvoir avec Blaise COMPAORE. Ils ont travaillé à étouffé le dossier. Nous sommes en droit d’exiger la manifestation de la vérité et de la justice. Rester dans le déni c’est être complice. Le peuple en réalisant l’insurrection, souhaite que tous les dossiers de crimes de sang et de crimes économiques soient jugés. Donc pour nous la trilogie vérité-justice-réconciliation n’est pas négociable. Tout autre cheminement est de la duperie couplée de marchandages macabres.
Certaines Organisations de la Société Civile, à la lecture de la situation socio-politique actuelle, n’ont pas hésité à demander la démission du gouvernement. Quelle appréciation faites-vous ?
Le rôle d’un gouvernement est de s’occuper des préoccupations des populations (sécuritaire, alimentaire, de santé, d’éducation, de liberté, etc.). A l’analyse de la situation socio politique actuelle nous constatons un piétinement et un tâtonnement des dirigeants. La bien séance voudrait que lorsqu’on n’est pas capable de répondre aux préoccupations que l’on permet à d’autres d’y répondre avec un programme de société à la hauteur des ambitions des populations. Donc démissionner d’un gouvernement suite au constat de son incapacité est une des règles élémentaires dans une démocratie moralisée et vertueuse.
Aux lendemains des élections du 29 novembre 2015, était-il objectif ou illusoire de penser que le Burkina post insurrectionnel en tant que « Etat normal », serait exempté des difficultés qu’il connait aujourd’hui ?
Le Burkina Faso a des hommes capables et des ressources suffisantes. L’ensemble de la classe politique bourgeoise a travaillé avec l’impérialisme notamment français pour briser l’élan des populations vers un changement structurel. Après l’insurrection l’impérialisme a mis ses batteries d’institutions pour revenir sur le système capitaliste tant décrié par les masses avec en toile de fond de montrer au monde que le chemin emprunté par le peuple burkinabè n’est pas salutaire, pour que d’autres peuples ne puissent pas se défaire des chaînes de peuples sous développés et dépendant de l’aide extérieur. Et nos dirigeants y travaillent avec ardeur, c’est pourquoi ils pensent que le peuple demande trop. Ceux qui sont au pouvoir, y sont depuis près de 30 ans, les dossiers politiques, économiques, culturels, sociaux, militaires sont leurs œuvres ou les conséquences de leurs œuvres en termes de « difficultés ». Pendant la campagne, ils ont eux-mêmes signifié qu’ils « sont expérimentés » et « sont la solution » !
Il n’y a finalement pas eu de trêve sociale pour permettre au nouveau régime de s’installer et dérouler son programme, comme ce qui se demandait après les élections. La pression a-t-elle fait bouger les lignes comme vous l’espériez?
Justement, arrêtons le mensonge et la démagogie car ceux-ci sont destructeurs dans la construction de l’avenir d’un peuple. Nous avons donc au pouvoir des « anciens-nouveaux dirigeants » conformément à leurs propres propos pendant la campagne présidentielle.
Par ailleurs, le 5 novembre 2015, bien avant les élections, nous avons adressé à tous les candidats en compétition une adresse sur les revendications qui les attendent. Dans les sorties médiatiques ils se sont exprimés là -dessus encore conformément à leur expérience, en signifiant qu’après six mois d’exercice du pouvoir les problèmes des populations soulevés trouveront solutions. Vous constaterez aisément que les problèmes que vivent les populations n’ont pas faits de trêve, bien au contraire ces problèmes se sont accentués. D’où l’appel lancé à toutes les structures de s’organiser, se mobiliser pour la défense des acquis de l’insurrection populaire et de la résistance héroïque. Les peuples mobilisés et déterminés étant toujours victorieux, il n’y a pas de raison à ce que nous n’espérerions pas que les choses bougent dans le bon sens.
La pression sociale continue et on assiste quotidiennement à des annonces de préavis de grèves par les différentes corporations syndicales de l’administration, y’a-t-il eu un mot d’ordre général de leur structure mère, la CGT-B ?
Il se pourrait mais ce n’est pas un fait de mode mais c’est sur la base de l’analyse de leurs préoccupations que les travailleurs vont en lutte et ces préoccupations sont connues des dirigeants. En l’absence d’une attention soutenue et de propositions concrète seule la lutte permet d’avancer. Dans ce sens donc, si ces préoccupations ne sont correctement traitées et à temps, c’est un devoir pour la Confédération de s’assumer.
Où en est-on avec les discussions gouvernement-syndicats ?
Nous sommes toujours en attente de discussions sérieuses, franches, sincères et porteuses de fruits. Pas du théâtre ! Parce que la maladie et la faim ne sévissent pas en théâtres !
Quel est l’état des lieux de l’application de la loi 081 pour les travailleurs de la fonction publique ?
La loi a été appliquée, mais avec des erreurs, des incorrections et des injustices par certains secteurs d’activité. Le cas des encadreurs pédagogiques est un exemple illustratif ! En plus il y a des dispositions de la loi qui ne favorisent pas le dialogue sociale. Voilà pourquoi une fois de plus la Confédération rend hommage à nos devanciers qui ont mené cette bataille depuis 1997, bataille que nous avons poursuivi jusqu’à l’adoption de la loi 081 le 24 novembre 2015 par le Conseil National de la Transition (CNT). Partant de là , il est impérieux de lancer un appel vibrant à tous les travailleurs de rester unis et solidaires, pour qu’ensemble nous puissions bien nous organiser pour arracher davantage des acquis, notamment la corrections des incongruités dans cette loi, incongruité qui de mon point de vue pourraient avoir été expressément faites afin de créer l’incompréhension d’une part entre les travailleurs et leurs dirigeants syndicaux et d’autre part opposer les couches socio professionnelles entre elles. C’est seulement dans l’union, la solidarité et l’action dans la discipline que nous parviendrons à arracher des acquis.
Dans l’affaire de la dernière grogne du personnel des médias publics, le mot d’ordre de grève avait été levé avant terme avec l’engagement de la CGT-B d’endosser la responsabilité de la suite des discussions si le gouvernement ne réagissait pas, qu’en t-il de nos jours ?
Voilà pourquoi j’ai précédemment dit que nous suivons toutes ces situations de près et nous aviserons en temps opportun. La vigilance avec ces autorités doit être plus que de mise. Vous vous souviendrez que le 30 octobre 2014, après l’Assemblée Nationale ce sont les médias d’Etat qui ont été visés, parce que les insurgés estimaient que l’information diffusée n’était ni partiale, ni équilibrée encore moins dans le sens des aspirations du peuple. C’est sur cette base que le Conseil National de la Transition (CNT) a voté la loi qui doit permettre la transformation de ces médias d’Etat en sociétés d’Etat, en vue de leur conférer une autonomie au sens propre du terme sur les plans fonctionnement, économique etc. Donc ces revendications portées par le SYNATIC engagent les insurgés. C’est un devoir de veiller à ce qu’elles aboutissent.
Quelles sont les grands points de la plateforme revendicative de l’UAS ?
Sans être exhaustif, les quatres grand axes de l’adresse du 5 novembre envoyé aux candidats pendant la campagne pour les élections présidentielles sont :
- La vérité et la justice pour tous les martyrs de l’insurrection populaire et de la résistance contre le putsch, le dédommagement de leurs familles et la considération de leurs enfants comme des pupilles de la Nation ;
- La lutte contre l’impunité des crimes économiques et de sang et contre la fraude ;
- La lutte contre la vie chère : Correction des erreurs de la loi 081, relecture des lois 033 sur les EPE, 027 sur les Collectivités Territoriales, 028 sur le code du travail, la diminution des prix des produits de grande consommation et le contrôle de leur qualité et quantité, la diminution conséquente des prix des hydrocarbures et son impact sur les prix des transports, l’accessibilité aux services sociaux de base (santé et éducation etc.).
- La lutte pour la défense et l’approfondissement des libertés démocratiques, politiques, syndicales et de presse.
Le premier ministre Paul Kaba THIEBA faisait la promesse le 24 octobre dernier que les fonds seront mobilisés à la conférence de Paris en décembre pour répondre aux attentes des populations à travers le financement du PNDES, quelle appréciation faites-vous ?
Cette sortie pose de façon patente la problématique de notre indépendance politique, économique, sociale, culturelle et militaire. Parce que de mon point de vue, le PNDES est la SCADD qui a tout simplement changé de nom.
Ensuite, ce qui semble aberrant est que, le Syndicat des Impôts et du Domaine (SNAID) est en grève pour revendiquer l’amélioration des conditions de travail et a même clairement dit que si les conditions étaient réunies, le financement de ce PNDES pouvait être entièrement recouvré au Burkina Faso sur place sans avoir à aller à Paris. Sur ce, le syndicat demande à ce que les agents qui font ces recouvrements soient sécurisés par la police, que les bureaux de recouvrements soient sécurisés, que l’Etat fasse un plan d’investissement en construction de bâtiments pour les services des impôts car la location leur coûte au moins 600 millions de francs CFA par an en dépenses, et que les agents aient des dotations suffisantes en carburant et moyens de locomotion pour le recouvrement etc. Mais si un Gouvernement post insurrectionnel, ferme les yeux sur de telles revendications patriotiques et envisage une conférence de Paris, ce n’est rien d’autre qu’un esclave qui se complait dans ses chaînes d’esclavage !
Enfin, regarder le post de douane d’Intagom où il y a eu une attaque terroriste qui s’est soldée par la mort d’un douanier ; sans réfectionner les impacts de balles de cette attaque sur le bâtiment, on y affecte 4 nouveaux agents de la douane pour poursuivre le recouvrement de recette pour l’Etat. Dans de telles conditions de travail où le mental des agents est au talon, quelle qualité de service qu’un gouvernement responsable peut-il attendre ? Sommes-nous donc véritablement indépendant dans ces choix politiques et économiques ?
Pour le chef du gouvernement il s’agira à Paris de « privilégier la mobilisation de dons et des appuis budgétaires », et à l’interne, miser sur le financement des projets par des opérateurs privés. C’est ce que vous avez toujours demandé c’est-à -dire éviter au maximum les institutions de Bretonwood ?
Ah bon ! Donc le gouvernement a compris qu’éviter les institutions de Bretonwood c’est organiser une conférence à Paris et « privilégier la mobilisation de dons et des appuis budgétaires » ?
Voyez-vous que ce n’est pas seulement scandaleux, c’est dramatique !
Un mot sur le projet de la nouvelle constitution et le passage du Burkina Faso à la 5ème république.
Sur la relecture de la Constitution en cours, je réaffirme notre attachement aux principes suivants en prendre en compte dans sa rédaction : principe de l’élection à tous les hauts postes de responsabilité de l’administration publique, principe de redevabilité au peuple à tous les niveaux de responsabilité (exécutif, législatif, judiciaire) ; Principe de la séparation et de l’équilibre des pouvoirs d’où découle une indépendance bien comprise de la justice ;Principe de la consécration et du respect des libertés et droits ;Constitutionnalisation de l’insurrection et de la résistance populaire ; Garantie de la souveraineté du peuple sur certains domaines essentiels (sécurité, intégrité territoriale, santé, alimentation, éducation) ;Promotion des langues nationales à l’école et dans l’administration ;Limitation des mandats présidentiels et non mise en place d’un Sénat ;Election des maires au suffrage direct, etc.
Les syndicats ne vont-il pas se prendre au piège dans des compromissions politiques avec leur participation à cette aventure ?
Notre peuple dont le mouvement syndical est une composante, est fortement interpellé sur des questions importantes touchant l’avenir du pays. C’est dans ce sens d’ailleurs qu’il avait pris part aux assises qui ont porté sur l’avant-projet de la Constitution du 2 juin 1991 et qui a été promulguée le 11 juin 1991. A l’occasion le mouvement syndical avait publié une déclaration historique autour de cinq grand points notamment le maintien du multipartisme, le rejet d’un mandat présidentiel de 7 ans pour un mandat présidentiel de 5 ans renouvelable une seule fois, le rejet de la mise en place d’une seconde chambre parlementaire (appelé ultérieurement SENAT) etc. Mais l’entêtement des politiciens, les calculs égoïstes sur la base d’intérêts personnels ont conduits certains a accompagner Blaise COMPAORE dans la violation répétée de ces principes pour l’ancrage du système. Le peuple ne doit pas être oublieux surtout !
Quelles sont vos futures actions ?
Elles seront fonctions de l’évolution de la situation nationale et du traitement réservé aux engagements pris par le gouvernement.
Interview réalisée par Modeste KONOMBO
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