Depuis un certain temps, le Conseil Supérieur de la Communication (CSC) défraie la chronique. L’autorité de régulation de la communication est en proie à des dissensions internes graves. Les protagonistes (conseillers et personnel administratif) se livrent une guerre d’intérêts, de clans. Jamais de son histoire, l’image de l’institution n’a été aussi ternie et malheureusement par ceux-là même qui sont pourtant censés la défendre.
Les conflits internes qui perdurent en son sein donnent l’image d’une institution qui sombre de jour en jour dans le chaos, au mépris de l’esprit de responsabilité et de dignité qu’elle doit incarner. Cela est d’autant plus déplorable que les défis auxquels fait face l’institution n’ont jamais été aussi importants et impérieux qu’en ces moments, avec un contexte national marqué par d’énormes défis dans tous les domaines en général et dans le secteur de la communication en particulier.
L’Association des Journalistes du Burkina (AJB), la Société des Editeurs de la Presse Privée (SEP) et le Syndicat Autonome des Travailleurs de l’Information et de la Culture (SYNATIC) déplorent la dégradation de la situation au Conseil Supérieur de la Communication en raison principalement du comportement déplorable des acteurs incapables de se mettre à la hauteur de leur mission. C’est l’occasion pour l’AJB, la SEP et le SYNATIC de dénoncer la procédure de désignation des conseillers.
En effet, le collège des conseillers est mis en place en écartant les organisations faitières au profit de certaines associations qui n’ont pas encore fait la preuve de leur représentativité et ce, par le moyen de la cooptation et du parrainage politique. Du reste, cette démarche partisane et non représentative pour constituer le collège des conseillers du CSC est l’une des raisons de la crise actuelle et justifie l’incapacité de ces derniers à s’élever à la hauteur des nobles missions d’une institution républicaine en charge de la régulation de l’information et de la communication.
Bien que souvent écartés de la mise en place du collège, l’AJB, la SEP et le SYNATIC ne sauraient rester indifférents à cette situation qui n’honore aucunement l’institution et la profession. Sans entrer dans les détails de ces conflits internes, nos organisations constatent qu’ils ont certainement été le prétexte pour le gouvernement d’opérer un quasi passage en force avec la récente relecture de la loi portant composition, organisation et attributions du CSC tout en s’assurant de toujours garder la main sur l’institution. En effet, de toutes les relectures des textes régissant le CSC, nos organisations ont toujours participé au processus quand elles ont été consultées et à temps. Pour ce cas-ci, le gouvernement s’est livré à un jeu d’exclusion de nos organisations.
Nous sommes surpris de cette mise à l’écart de nos structures au moment où le CSC avait le plus besoin de l’apport de tous en vue de se consolider davantage dans l’intérêt supérieur de la Nation. Indépendamment de la crise en cours, l’idée de relecture des textes du CSC était déjà posée comme une nécessité dans le milieu des professionnels et des acteurs des médias. Nos structures ont toujours dénoncé la politisation du CSC et la dernière relecture ne constitue guère un gage de changement. Les acteurs politiques (président du Faso, président de l’Assemblée nationale) désignent toujours la majorité des conseillers ; ce qui consacre leur mainmise sur l’institution dont l’indépendance proclamée par la constitution n’est en fait qu’une vue de l’esprit.
Le Burkina Faso est à un tournant important de son histoire, caractérisé par une recrudescence des attaques terroristes et une situation politique et sociale toujours préoccupante. Dans le même temps, les médias et les citoyens doivent faire l’apprentissage d’une nouvelle façon de communiquer. C’est donc dire que le peuple burkinabè a plus que jamais besoin d’un CSC crédible, indépendant et fort. Les missions de régulation de l’information et de la communication ne peuvent pas être permanemment sacrifiées sur l’autel des querelles personnelles, des égos et de la rapacité. Les agissements actuels des acteurs ont fini de dévoyer les missions du CSC et c’est bien dommage que l’on arrive à de tels égarements.
A l’analyse, le CSC est entrain de passer à côté de l’histoire, au moment où le peuple burkinabè attend de lui, un exercice de sa mission à la hauteur des défis auxquels le Pays est aujourd’hui confronté. L’AJB, la SEP et le SYNATIC :
• déplorent le fait que pour des intérêts inavoués, les conseillers et les agents de cette institution relèguent les priorités de l’institution au second plan et se livrent à des querelles de chiffonniers ;
• regrettent le fait que le gouvernement mette à l’écart des organisations professionnelles des médias dans le processus de relecture des textes du CSC ; ce qui a pour conséquence un déficit de consensus ;
• dénoncent la relecture à minima de la loi organique sur le CSC qui, sans résoudre, le problème de l’institution, accorde toujours aux politiques la possibilité de noyauter et contrôler l’institution ;
• appellent le gouvernement à travailler dans le sens de la crédibilisation du CSC en engageant un dialogue ouvert et franc avec tous les acteurs des médias en vue d’une relecture urgente et en profondeur de la loi organique portant organisation, composition, attribution et fonctionnement du CSC.
Nous affirmons avec force que le CSC est en train de passer à côté de l’histoire, au moment où le peuple burkinabè attend d’elle une mission de régulation à la hauteur des défis historiques auxquels le pays est confronté.
Ouagadougou, le 26 avril 2018
Pour l’AJB
Le Président
Guézouma SANOGO
Pour la SEP
Le Président
Boureima Ouédraogo Chevalier de l’Ordre du Mérite
Pour le SYNATIC
Le Secrétaire Général
Siriki DRAME Chevalier de l’Ordre National