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«Dans l’avenir, il faut craindre pour la famille politique de Salifou Diallo», Hervé Ouattara du CAR Spécial

samedi, 02 septembre 2017 10:46 Écrit par  Modeste KONOMBO/Infobf.net Publié dans Grande interview

Le Burkina Faso, depuis quelques temps, est animé par une actualité sinistre avec des jours qui se succèdent et qui se ressemblent, parceque rythmés de désolation de tout genre. Hervé Ouattara, membre fondateur du mouvement Bori Bana, leader du Citoyen Africain pour la Renaissance (CAR), donne sa lecture des récents évènements vécus par le Burkina. Attaques terroristes, décès du président de l’Assemblée nationale Salifou Diallo, ce sont des sujets que nous avons abordé avec lui le 28 août dernier et sur lesquels, il y va «sans gant», non sans évoquer sa récente sortie hors du pays, un voyage autour duquel beaucoup de choses ont été dites.

Infobf.net : Il nous est revenu que vous étiez en tournée en Europe et aux Etats unis. On a entendu parler d’exil, de rencontre entre vous et l’ancien premier ministre Yacouba Isaac Zida. Dites-nous, de quoi s’agissait-il exactement?

Hervé Ouattara : (Rire) non, j’étais en tournée dans le cadre de mes activités. Je suis arrivé depuis le 2 août à 15h. Cette tournée est juste un programme qui a été élaboré depuis un moment donné et qui devait me permettre de sillonner certains pays de l’Europe et aussi les Etats-Unis. J’ai échangé avec la diaspora sur deux initiatives, la première concerne le franc CFA et la deuxième, le Forum citoyen qui est en gestation actuellement et qui va regrouper la jeunesse de la diaspora et celle du Burkina Faso pour réfléchir sur comment mettre ensemble nos forces pour construire une Afrique solide. Ce projet verra le jour en Belgique tout comme ici au Burkina Faso et je pense que le pari est gagné parce qu’il ya déjà un comité international qui s’y atèle et si tout va bien, les premières assises de ce forum se tiendrons en novembre prochain, voilà.

Quel regard portez-vous sur l’actualité politique aujourd’hui avec la disparition du président de l’Assemblée nationale Salifou Diallo ?

Vous savez que quand on annonce la mort d’un homme comme Salifou Diallo, que tu l’aime ou que tu ne l’aime pas, sa mort est un choc. D’abord, pour être franc avec vous, je n’y ai pas cru. On se demandait si ce n’est pas encore un coup que ce monsieur est en train de jouer, surtout qu’on sait tout ce qui se disait au Burkina Faso par rapport à ses intentions et ses ambitions. On se demande réellement est ce que ce n’est pas un nouveau «tour de passe» de Salifou Diallo jusqu’à ce que la presse reprenne l’information et finalement, on s’en convainc qu’il est parti. Salifou Diallo est parti, c’est une perte pour sa famille biologique, politique, ses proches collaborateurs et tout le monde en même temps. Ça fait un vide, un vide et ça fait déjà une panique dans la mesure où on sait que nombreux sont ceux-là qui vivaient ou exerçaient au dépend de lui. Il y avait tout un réseau qui gravitait autour de lui, et sa disparition aujourd’hui laisse un certain nombre d’orphelins qu’on ne peut pas citer. Alors, qu’est-ce que ces derniers deviendront dans ce pays ? Dieu seul sait, de toutes les façons, on se demande comment combler 30 ans de gestion d’un homme comme Salifou Diallo ? Je crois que nous avons partagé les même visions à un moment donné de l’histoire de notre pays, mais nous n’étions plus sur la même lancé depuis un bout de temps et du moment où il n’est plus là, tout ce que nous pouvons faire c’est demander à Dieu de l’accueillir dans sa demeure et prier réellement pour le repos de son âme et aussi appeler les gens à se mettre au travail pour faire avancer les choses.

Finalement, que devient votre lutte que vous aviez engagée ? Que va devenir Bori bana que vous avez mis en place et qui semblait très critique vis-à-vis des actions de Salifou Diallo ?

Non, pour notre combat, on n’a pas fait une fixation sur Salifou Diallo paix a son âme, ça je l’ai souvent dit et il faut qu’on arrive à recadrer les choses. La vérité c’est qu’à un moment donné, Salifou Diallo était en fait un tout. Il savait la vérité sur pas mal de dossier et nous le combat était de pousser la justice, à travers Salifou Diallo pour avoir cette vérité là, c’était pour qu’il parle de ce qu’il sait et que justice soit rendue à beaucoup de personnes, mais ce n’était pas vraiment une fixation sur sa personne. Nous avons un combat de principe et on a estimé qu’il fait parti des derniers quand même qui restent dans ce pays, qui pouvait nous éclairer en nous permettant de régler un passif de notre histoire afin de réparer les tors que certains ont subit, voilà. Dont c’est pourquoi je disais tantôt que disparition brutal de Salifou Diallo est une perte pour le Burkina Faso, il est parti avec beaucoup de choses et notre génération perd énormément parce que nous ne saurons jamais la vrai version sur un certain nombre de dossier dans ce pays.

Et comment voyez-vous l’avenir politique du Burkina Faso à l’horizon 2020 ?

Pour l’avenir du Burkina, je pense qu’il n’y a pas de soucis à se faire, le Burkina Faso est maintenant un pays mature. La disparition d’un homme, aussi grand soit-il comme Salifou Diallo, ne devrait pas arrêter le cours de l’histoire mais au contraire nous devons avancer et se rendre compte que ce pays fait 18 millions de burkinabè donc, 18 millions de compétences. Il faut partir sur les expériences de ainés pour faire avancer les choses. Parcontre dans l’avenir, il faut craindre pour la famille politique de Salifou Diallo. C’était l’artisan de tout et de tous, dans ce parti là. C’était le faiseur de roi, c’était le stratège, c’était l’idéologue, c’était vraiment le tout en même temps. Avec donc sa disparition brutale comme ça, je ne sais pas comment ce parti pourra remonter la pente et remplacer ce monsieur. La seule chose qu’on peut aujourd’hui dire sans sourciller c’est que les choses ne seront pas reluisantes pour ce parti politique.

L’actualité du Burkina est aussi marquée par ces attaques terroristes à répétition. Finalement, comment sortir de cette situation selon vous ?

C’est ignoble et il n’y a pas de terme réel pour qualifier cette barbarie à laquelle nous assistons avec impuissance et où on assassine nos frères, nos enfants, nos mères et nos pères sans que nous ne puissions y apporter une réponse adéquate. Mais ce qui me révolte avec l’attaque du restaurant café Aziz Istanbul, c’est qu’elle a été perpétrée au même endroit que le Cappuccino, c’est la même rue et c’est même des voisins pas trop éloignés. Je me pose alors des questions sur ce qu’a fait notre gouvernement depuis l’attaque de Cappuccino pour que ça ne se répète pas ? L’attaque pouvait être ailleurs et on comprendrait, mais pas encore sur l’avenue Kwamé Nkrumah ! Pourquoi n’avons-nous pas tiré leçons du premier attentat là-bas et éviter que ça se reproduise avec le même scénario et le même mode opératoire? Il y a quand même de quoi se poser des questions. On pourrait même s’inquiéter de notre service de renseignement et par rapport à notre sécurité. Je tiens quand même à féliciter nos Forces de défense et de sécurité qui ont répondu de façon efficace ce jour-là, nous avons quand même été touché avec 18 morts et je présente mes condoléances aux familles des victimes. Je pense sincèrement qu’il ya un travail de fond à faire pour sécuriser les burkinabè.

Pour terminer, avez-vous des nouvelles de l'ancien premier ministre Yacouba Isaac Zida ?

Non. La seule chose que je sais, c’est qu’il s’intéresse à son pays. Il n’est pas indifférent aux différents problèmes que vivent les burkinabè, la preuve est qu’il réagi chaque fois qu’il ya quelque chose et c’est déjà bon, moi ça me rassure, ça montre que c’est quelqu’un qui aime bien son pays. Je ne me suis pas trompé, je me rends compte que j’avais raison de croire en lui. Il a tout donné pour son pays, moi, ça me réconforte dans ma position actuelle et tout ce que je demande, c’est que Dieu l’aide là où il est, pour qu’il puisse tenir le coup et jouer le rôle qui lui appartient.

Quel rôle ?

Je pense que tout burkinabè a un rôle à jouer, alors qu’il joue pleinement son rôle.

 

Interview réalisée par Modeste KONOMBO

Infobf.net